Pascal Perrier (Cardif) : « les PER ont connu un excellent démarrage qui aurait certainement été plus important sans la crise »

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Pascal Perrier (Cardif) : « les PER ont connu un excellent démarrage qui aurait certainement été plus important sans la crise »

La loi relative à la croissance et la transformation des entreprises du 22 mai 2019, dite loi PACTE, est venue reformer l’épargne retraite en instituant, au 1er octobre 2019, trois nouveaux plans d’épargne retraite (PER) – un plan individuel et deux plans d’entreprise – lesquels ont définitivement remplacé les produits existants (PERP, PERCO, Madelin, « article 83 », etc.), le 1er octobre 2020.

L’objectif du Gouvernement : simplifier, développer et harmoniser l’épargne de long terme pour en accroître l’attractivité.

Différences entre les nouveaux PER et les anciens dispositifs ; impact éventuel de la crise sanitaire ; comparaison avec l’assurance vie ; etc. Un an après le lancement de ces nouveaux plans d’épargne retraite, où en est-on ? Entretien avec Pascal Perrier, directeur des réseaux CGP – courtiers et e-business au sein de BNP Paribas Cardif.

Previssima – Selon les derniers chiffres publiés par la Fédération française de l’assurance (FFA), près de 210 000 PER individuels et 3 000 PER entreprise ont été souscrits depuis le 1er octobre 2019. Que pensez-vous de ce démarrage ?

Pascal Perrier – Je considère que cela constitue un excellent démarrage. À travers ces nouveaux PER, le Gouvernement a amélioré les caractéristiques des contrats existants. En effet, si l’on se penche du côté de l’ancien plan d’épargne retraite populaire (PERP), l’absence d’incitation fiscale et l’impossibilité de sortie en capital ou à 20 % seulement ont été deux points rédhibitoires ayant conduit aux faibles ventes de ce produit.

Via ces nouveaux produits d’épargne retraite, le législateur a eu la sagesse de corriger ces éléments, en mettant en place une fiscalité avantageuse permettant d’accroître le rendement global de l’épargne, et en offrant des possibilités de sortie en capital, en capital fractionné ou de sortie anticipée en capital dans les cas de force majeure définis par la loi.

C’est ce contexte qui explique le succès du démarrage du PER, un produit qui répond à la demande.

La crise sanitaire a-t-elle impacté le nombre de souscriptions ? Si oui, dans quelle mesure d’après-vous ?

C’est compliqué à dire puisque nous avons des signaux contradictoires : d’une part, nous constatons un très bon démarrage des PERIN (PER individuels, ndlr), je pense même que le marché est au-delà des objectifs fixés ; d’autre part, du fait de la crise sanitaire et du confinement consécutif, les Français ont moins consommé et ainsi épargné près de 100 milliards d’euros. En temps normal, une part de cette somme aurait certainement été investie, soit en assurance vie, soit en produit retraite.

Il est très probable que les ménages français ont aujourd’hui tendance à laisser le produit de leur épargne et de la non-consommation sur des comptes à liquidité immédiate, du fait de la situation.

Par ailleurs, certaines des personnes qui disposaient d’une capacité d’épargne importante (commerçants, TNS, CSP + ou ++), peuvent se retrouver actuellement dans des situations professionnelles compliquées et de ce fait, n’épargnent pas ou dans une moindre mesure.

En fin de compte, selon moi, le succès des PER aurait très certainement été plus important sans la crise ; toutefois, lorsque les agents économiques auront retrouvé de la perspective, les flux vers les produits d’épargne retraite seront probablement beaucoup plus conséquents.

Les PER présentent des avantages indéniables par rapport aux anciens produits d’épargne (fiscalité, sortie, etc.). Pensez-vous que la commercialisation de ces nouveaux contrats permettra de favoriser le recours à l’épargne retraite, peu développée en France ?

La mise en œuvre de ces nouveaux PER a pour ambition de développer le recours à l’épargne retraite, actuellement faible. En effet, lorsque l’on compare la part des prestations versées en France en matière de retraite supplémentaire, cela correspond à 5 % de l’ensemble des prestations de retraite servies ; en comparaison, cette part s’élève à 16 % en moyenne dans les pays de l’OCDE.

Jusqu’à l’arrivée du PERIN, le produit préféré des Français pour se constituer une retraite, indépendamment des régimes de retraite obligatoires était l’assurance vie, faute de produit dédié  ; aujourd’hui avec le PERIN, nous disposons d’un dispositif de retraite individuel spécifique à la préparation de la retraite.

Donc, fort de ces constats et face au déficit du système des retraites qui pourrait continuer à se creuser, le Gouvernement a été bien inspiré de donner la possibilité aux individus de préparer leur retraite de manière individuelle, à l’aide d’un produit structuré et organisé.

Selon vous, vaut-il mieux souscrire un PER individuel, une assurance-vie… ou les deux ?

Les deux, puisque ces produits sont complémentaires. Ils n’ont pas les mêmes caractéristiques et ne sont pas de même nature : le PERIN est un produit qui a pour objectif principal de préparer sa retraite, tandis que l’assurance vie a une visée patrimoniale et est résolument tournée vers la transmission.

Parmi les grandes différences entre le PERIN et l’assurance vie :

  • l’assurance vie permet de disposer d’une liquidité à tout moment alors que sur un PERIN, l’accès à une liquidité est possible seulement si l’on est concerné par l’un des 5 cas de déblocage anticipé auxquels s’ajoute l’achat de la résidence principale. Dans les autres situations, une fois que l’on est engagé, il n’est pas possible de retirer son argent, donc, patrimonialement, on n’est pas sur le même type de démarche ;
  • la disponibilité de l’épargne et la nature de la transmission, c’est-à-dire que l’assurance vie permet, en cas de décès, de transmettre en franchise d’impôt 152 500 €, ce qui n’est pas le cas avec le PERIN.

En définitive, il y a des différences suffisamment notables pour que ces deux produits s’adressent à des besoins et des finalités différentes. Je conseille vivement de prendre les deux.

Au sein de Cardif, le transfert d’un PERP ou d’un Madelin vers un PER se fait à l’initiative du client. Quelle proportion de transferts avez-vous à ce jour ? Quid des nouvelles souscriptions ?

Il n’y a pas de transfert de masse pratiqué chez Cardif, car certains contrats peuvent présenter des caractéristiques qui ne rendent pas leur transfert pertinent ; c’est notamment le cas des vieux contrats Madelin avec des garanties de table ou des contrats Madelin à petits capitaux.

C’est donc au conseiller qu’il revient de dire à son client, en fonction de sa situation et des caractéristiques de son ancien contrat, s’il est intéressant pour lui d’un point de vue patrimonial et fiscal, de transférer son contrat ou non. C’est pour ces raisons-là qu’on ne fait pas de transfert de masse.

Toutefois, dans 98 % des cas, il est plus avantageux pour le client de transférer son ancien contrat vers un PERIN.

En outre, au-delà des transferts, nous avons beaucoup de nouvelles souscriptions de PERIN, ce produit peut être particulièrement intéressant au niveau fiscal, si la tranche marginale d’imposition s’élève à 30 % ou plus, car l’impact de la déduction fiscale est important et augmente d’autant le rendement de l’investissement.

Le PERIN est d’ailleurs un produit qui attire la clientèle dont le taux marginal d’imposition est supérieur à 30 %. Au sein de Cardif, l’âge moyen de souscription se situe au-dessus de 50 ans, car c’est en général à cet âge-là que vous disposez d’un capital un peu plus constitué, de revenus un peu plus élevés et que vous atteignez cette tranche d’imposition égale ou supérieure à 30 %.

Vous proposez actuellement trois types de PER, avez-vous prochainement prévu des axes de développement ?

Nous prévoyons d’ajouter des garanties supplémentaires à nos contrats d’épargne retraite et notamment la mise en place d’une garantie de bonne fin (laquelle, prévoit, en cas de décès de l’assuré, la prise en charge par l’assureur des cotisations normalement versées par l’assuré sur le contrat d’épargne retraite jusqu’à la date prévue au contrat. Elle permet ainsi le maintien des garanties du contrat, ndlr).

En outre, nous apporterons de nombreuses améliorations aux contrats existants afin de les rendre beaucoup plus flexibles.

Pour ce qui concerne la distribution, nous nous concentrons sur les réseaux physiques de CGP (conseillers en gestion de patrimoine, ndlr) et courtiers spécialisés en protection sociale et il n’y a pour l’heure aucun développement prévu concernant d’éventuelles offres destinées à une distribution au travers de pure digital players.

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